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"Mon dévidoir de l'âme"
"Mon dévidoir de l'âme"
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22 février 2005

Petit conte de noël

  

 

 

 

  Les flocons virevoltent jusque sur ton visage , cristaux  étoilés scintillant dans cette nuit claire, dansant au gré d'un souffle léger de bise. Tu frissonnes, le regard jeté rêveusement sur la voûte céleste où règne majestueusement l'astre lunaire, souveraine étincelante sur sa cour stellaire. Tu fredonnes une mélodie d'antan, chant langoureux s'extrayant à mi mot  de tes lèvres rosées.  Les harmonies  enchantent le silence de cette nuit, ton propre murmure t'envoûte, te mène au delà de ce lieu, de ce Temps, dans l'illusion d'un souvenir, dans l'image confuse d'une réminiscence du passé. Cette atmosphère radieuse, ce parfum succulent de mets mijotant, ces voix, ces rires s'élevant tout autour de toi et ces lueurs chatoyantes, multicolores, emplissant avec une gaieté festive, la demeure.  Et tu revois, au travers de tes yeux d'enfant, ce sapin décoré de teintes dorées, argentées, émeraudes ou écarlates, fendu de guirlandes scintillantes,  parsemé de ces semblants artificiels de fruits, richement parés de couleurs luminescentes. Tu te remémore ces longues soirées de Réveillon, à attendre un  hypothétique vieillard barbu, affublé de son éternel costume rouge, parcourant le monde aux rênes  d'un traîneau aérien.  Et ces images défilent devant ton regard songeur, se reflétant sur ce voile de flocons de plus en plus denses,  telle une projection sur un écran vierge de salle obscure.

Un nouveau frisson t'enveloppe d'une douce froideur, parcourant ton échine dans un long tremblement imperceptible, hérissant ta chair et altérant furtivement ton souffle.

Tu aperçois soudain une ombre sur le sol, auprès de toi, une petite silhouette menue,  ornée de boucles enchevêtrées dont tu peux aisément distinguer les contours sombres de sa chevelure. 

Tu te détournes lentement.  Elle t'observe, silencieuse, du haut de ses huit hivers,  une poupée, fraîchement extraite de son emballage cadeau, serrée contre son cœur comme une mère pourrait porter son bébé.  Tu devines, dans son regard clair, un flot d'interrogation  et de paroles qui ne demandent qu'à se déverser. 

« Maman… » souffle t'elle en approchant.

- Qu'est ce qu'il y'a mon Bébé ?

Mais cette réponse malheureuse est sanctionnée par un air désapprobateur, une moue pincée et vexée.

« J'ai 8 ans, je suis plus un béb酠»

Tu souris.

Elle te ressemble tellement… Tout le monde le dit et toi même tu le sais. Elle a ce même regard pers, aux éclats parfois mutin ou froissé selon ses humeurs.  Elle a ces mêmes mèches dorées retombant sur ses pommettes rosées, ce même sourire ensorcelant, qui suffit à tout lui céder,  ce même visage angélique, que tu peux retrouver sur ces clichés classés, méthodiquement, dans des albums poussiéreux, qui sortiront inévitablement de leurs étagères comme lors tout long repas de Réveillon. 

Tu l'embrasse de tout ton amour, lui déposant un tendre baiser sur le front.

« Oh pardonne moi ma chérie… »


Et tu te souviens de ce premier Réveillon passé auprès d'elle, ces quelques heures qui avaient suivi sa naissance, lorsque tu l'avait serrée tout contre ton cœur, des larmes d'une joie intense, comme tu n'en avais alors jamais ressenti, roulant sur ton visage et mourant sur sa  petite tête endormie. A compter de ce jour, ta vie avait pris une tout autre voie : de femme, tu étais devenue mère… Et cela avait été le plus profond changement que tu aies pu connaître dans ton existence.  Durant cette première nuit de l'An Un de ta nouvelle vie, tu n'avais cédé à la pression des sages femmes qui avaient, exceptionnellement, dû consentir à te laisser dormir auprès de ton enfant. Mais tu n'avais fermé l'œil de la nuit, absorbée par son visage de chérubin, par sa peau laiteuse, à la douceur à nulle autre pareille, par son regard éperdu et ensommeillé quand elle s'éveillait quelques secondes avant de sombrer à nouveau dans un profond somme. 

Depuis ce jour de félicité, chaque Réveillon te remémore cet instant, et tu sais que, lors de chaque Réveillon futur, tes souvenirs se perdront rituellement dans ce jour passé.

Tu t'imagines, assises à ce même endroit, dans quelques dizaines d'années.  Des mèches argentées auront eu raison de ta chevelure dorée, tes yeux mêlant reflets saphirs et émeraudes,  se cacheront désormais derrière de fins verres, cernés d'une mince monture métallique cuivrée,  des rides creuseront les coins de tes lèvres et de ton regard. Derrière toi, s'élèveront les voix de tes enfants et les rires et les cris de leurs propres enfants.  Ta demeure s'éclairera de longues guirlandes confectionnées en de nouveaux composant alors méconnus,  mais aux propriétés lumineuses extraordinaires, se vêtira de teintes merveilleuses, s'enivrera d'une euphonie des plus délicieuses. Les savoureuses effluves des mets préparés par ta fille aînée -celle là même que tu sers entre tes bras- t'envelopperont, séduiront tes papilles, griseront tes sens.  Et tu seras heureuse.  Et tu te remémoreras peut être ce jour où tu avais eu ces visions de l'avenir en embrassant ta fille, avec tout l'amour que ton être pouvait contenir.

Lentement une larme roule sur ta pommette, tandis que ta fille se détache de toi, affectueusement, en t'observant.  Cette scintillante gouttelette s'enfuit le long de ta joue et finit sa course effrénée,  au coin de tes lèvres avant de s'éteindre dans un souffle.

« Tu pleurs, maman ?  Tu es triste ? »

-Non, je ne suis pas triste, ma chérie… Je suis heureuse!

Tu te lèves, en la soulevant doucement à bout de bras avant de la porter contre ton sein.  Vos deux regards se rencontrent, emplis d'une intense affection, d'une profonde tendresse.

Tu souris.

« Je suis heureuse car tu es là… »

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Nota: Ce texte a été écrit durant les quelques jours précédents le dernier Réveillon de Noël et était en fait destiné comme présent  à une  connaissance ou plutôt une personne dont j'aimerais sincèrement qu'il naisse entre nous des liens d'amitié... Peut être l'avenir me réserve t'il une telle surprise!

Cette personne ayant inspiré ces quelques mots y ayant consenti, je me permets aujourd'hui de le publier ici...

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Commentaires
A
Voici le texte que je cherchais en m'égarrant sur ton blog ... Il est gravé dans mon coeur ... Merci
T
Les couleurs rendent le texte difficile à lire. Mais voici l'expression de l'amour.<br /> Cordialement
"Mon dévidoir de l'âme"
  • Coucher mes pensées sur un écran vierge est comme un exutoire. Y dévercer mon flot de songes et de reflexions, y étaler la nudité de mon âme sans artifice, voilà la raison d'être de ce blog...
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