Douce Hantise

Son visage me hante, m'obsède, m'assaille, me dévore...

Le gemme brun de son regard, le rosé discret de ses lèvres, le grain délicat de sa peau, la courbe déliciseuse de ses pommettes, la ligne pudique de sa nuque disparaissant sous une étoffe, l'intense nuit de sa chevelure ondoyant sur ses épaules.

J'aurais aimé ne jamais admirer sa beauté, ne jamais succomber à l'envoûtement de son charme, ne jamais connaître le cristal pur et mélodieux de sa voix.

Tout aurait été tellement moins complexe!

Mais cette existence hasardeuse et, peut être tout simplement, les méandres de mon âme quelque peu éperdue, ces tréfonds de mon esprit sur lesquels ma raison a si peu de prise, en ont décidé autrement...

Et chaque instant, ma déraison m'emprisonne dans la douce et amère contemplation de son enivrante beauté. Mon esprit semble désirer s'imprégner de sa magnificence afin de la graver au plus profond de mes songes, afin que chaque souvenir, chaque image, chaque parole converge vers elle et me consumme en un extatique mais déchirant et cruel éblouissement.

Peut être est ce dans le répressif dessein – sentence autoritaire et arbitraire de ma Raison, de ma Conscience - de me supplicier encore et encore, car il m'est interdit de ressentir un tel émoi. Peut être est ce simplement ma peine, le châtiment de ma honte et de ma culpabilité de me remémorer éternellement cette admiration, aux confinements d'une pieuse idolatrie, qui m'étreint d'une fébrile et cinglante volupté, chaque instant où je croise son regard.

L'oublier...

Seulement et simplement l'oublier...

Tel est le seul remède. Tel est le seul exutoire.

Mais ma mémoire ne semble pas être enclin à un tel dénouement. Le voile de l'oubli ne semble pas vouloir envelopper les réminiscences de son visage, de son regard, de son sourire.

Puis, en définitive, il semble que ce soit ma propre volonté qui y oppose la plus fervente et farouche résistance.

Je ne veux pas oublier, quoiqu'il en coûte...

Il n'est aucunement offert à tout à chacun de pouvoir admirer une telle sublime Beauté, un tel Charme séraphique. Cela m'apparaît comme une bienheureuse chance, un véritable honneur, une exceptionnelle destinée!

Non, je ne désire en rien oublier...

Je désire seulement que son visage continue à me hanter, m'obsèder, m'assaillir, me dévorer...

Même si cela doit demeurer muet, même si cela doit demeurer secret, même si cela doit être dénué de toute réciprocité...

Comments

[Célinette]

Un bel hommage à cette femme à " l'éclat de nuit" qui parfume jusqu'à l'enivrement tes mots (et tes maux!)